LES ANTISPÉCISTES – Arno Klarsfeld & Aymeric Caron

L’animal est au centre de la révolution Durable. Il est au cœur des préoccupations de l’antispécisme, un mouvement à la fois écologique et philosophique qui a vu le jour dans les années 70. Une sorte d’universalisme de la compassion. Un antihumanisme qui s’oppose au spécisme qui lui, reconnaît aux êtres humains le droit d’être une espèce d’essence supérieure aux autres animaux, de les exploiter ou de les maltraiter.
Pour les antispécistes, le sectarisme anti-animal est l’équivalent du racisme et du sexisme.

Ce combat est incarné en France par deux personnalités qu’en apparence tout oppose : Aymeric Caron, ancien animateur de Laurent Ruquier pour son émission « On n’est pas couché » ; et Arno Klarsfeld, avocat international connu pour son rôle central dans le procès Papon.
Le premier, vegan depuis ses 20 ans, milite pour réconcilier l’Homme, l’animal et la nature. Il s’oppose violemment – c’est sa marque de fabrique – à « l’écologie molle » d’Europe Écologie Les Verts. Caron compatit au sort des 70 milliards d’animaux non humains terrestres, des 2 000 milliards d’animaux marins que nous dévorons chaque année « pour satisfaire nos estomacs », mais aussi des 60 millions d’animaux massacrés pour leurs fourrures chaque année.
Le « spécisme » qui hiérarchise les espèces pour placer l’homme au-dessus de tous les animaux non humains est selon Aymeric un système qui détruit les humains, la planète, les animaux non-humains. D’après lui, eux sont les groupes agroalimentaires, le monde agricole et leurs lobbies liés aux média et aux politiques qui dissimulent la vérité sur le sort réservé aux animaux (…). En février 2018, Aymeric Caron a créé son parti REV – Rassemblement des Ecologistes pour le Vivant – avec un programme pour le moins novateur qui prévoit, entre autre, d’aller peupler les planètes avoisinantes pour lutter contre la surpopulation.
Arno Klarsfeld quant à lui se déclare « presque végétarien ». Il s’est d’abord engagé contre la tauromachie et la chasse à courre en France avant de promouvoir, auprès des politiques et des magistrats, le projet d’accorder une reconnaissance constitutionnelle aux animaux qui, selon les défenseurs de la cause animale, possèdent une conscience, une sensibilité.
En effet, en 2012, des scientifiques de l’Université de Cambridge ont publié un manifeste déclarant que les animaux possèdent des substrats neurologiques qui produisent la conscience, comme chez les humains. Que les animaux partagent avec les Hommes des sentiments et des sensations comme la peur, la joie, la tristesse et bien sûr la douleur.
Pour Maître Klarsfeld, si la France connaît des avancées, en excluant par exemple la tauromachie de son Patrimoine culturel immatériel, il reste urgent de reconnaître les droits des animaux comme il existe des droits de l’homme. Ainsi, en Inde, le législateur a déjà décidé que les oiseaux ne doivent pas être mis en cage mais doivent rester libres de voler ; en Argentine, le droit de vivre en liberté en tant que personne non-humaine pour une femelle orang-outan. Avant eux, Montaigne, Darwin, Rousseau, Zola, mais aussi la Bible et Gandhi avaient déjà réfléchi à une philosophie visant au respect et à la bientraitance des animaux.
Arno, Aymeric et les antispécismes ont en commun de faire un parallèle entre l’exploitation animale et l’esclavagisme occidental. Ils considèrent que l’esclavagisme, comme le traitement réservé aux animaux, repose sur les mêmes réflexes « coutumiers ». Que la soumission à l’homme de l’esclave comme l’animal repose sur le postulat qu’ils n’ont ni âme ni conscience. Que livrés à eux-mêmes, ils seraient incapables de survivre. Pour eux, les spécistes nient l’individu qui est ramené au rang d’objet.
De là à comparer le statut des femmes à celui des animaux et des esclaves il n’y a qu’un pas que franchissent sans hésiter les antispécistes. Parce qu’elles sont non seulement l’objet des fantasmes des hommes, de leurs désirs mais aussi les victimes de leur asservissement.
L’antispécisme est une nouvelle étape de l’humanisme, un « anumanisme » selon la formule de Caron, où les plus modérés ne nous demandent pas à tous de devenir végétarien du jour au lendemain, mais tout au moins de manifester notre gratitude envers les animaux en ne les faisant pas souffrir. D’éprouver pour eux de la compassion.

Écrit par Gérald Cohen | le 30/09/2019

Extrait de mon nouveau livre DIX MILLIARDS – La déferlante durable